EDI – Inégalités raciales au Canada

Fiche de rendement sur la pauvreté 2024 de Banques alimentaires Canada : Recherche sur l’EDI

Introduction :

La pauvreté est un phénomène multidimensionnel découlant d’injustices systémiques et structurelles profondément enracinées dans diverses formes d’oppressions, y compris le colonialisme, le racisme, le sexisme et le capacitisme. L’injustice structurelle désigne les processus sociaux, comme les normes juridiques, sociales et culturelles, qui menacent de manière systématique la capacité de certains groupes de développer et d’exercer leurs droits tout en permettant à d’autres, principalement des individus plus privilégiés, d’occuper une position dominante et de profiter d’un large éventail d’occasions. Au Canada, les systèmes et les structures interconnectés font obstacle aux groupes mal desservis, les empêchant de participer à la vie politique et d’accéder à des possibilités socioéconomiques comme l’emploi, le logement, l’alimentation, l’éducation, les soins de santé et les services de garde.

En général, la pauvreté touche de façon disproportionnée les groupes systématiquement marginalisés qui font face à des niveaux élevés de discrimination, de racisme et de stigmatisation. Selon le Conseil consultatif national sur la pauvreté, les groupes marginalisés susmentionnés sont : les Autochtones, les immigrants, les réfugiés, les personnes s’identifiant comme membres de populations ethnoculturelles et noires ou d’autres populations racisées, les personnes 2ELGBTQIA+, les personnes en situation de handicap, les personnes en situation d’itinérance, les enfants et les jeunes pris en charge par les services sociaux, les personnes vivant en établissement et les personnes vivant dans des régions éloignées. La marginalisation de ces groupes ne s’arrête pas qu’à l’exclusion socioéconomique; ils sont également invisibilisés socialement, ce qui explique le manque de représentation dans les statistiques officielles sur la pauvreté. La sous-représentation systématique des Autochtones vivant dans des réserves et des établissements, des personnes 2ELGBTQIA+, des demandeurs d’asile, des réfugiés et des personnes en situation d’itinérance témoigne de l’isolement et des lacunes socioéconomiques uniques auxquels doivent faire face ces individus. La non-représentativité des données nuit aux initiatives visant à refléter les réalités vécues par ces groupes marginalisés au Canada et à trouver des solutions.

Aperçu de la pauvreté :

Malgré la tendance à la baisse de la pauvreté au cours des dix dernières années, elle touche certains groupes plus que d’autres. En général, il s’agit de groupes marginalisés et négligés en raison d’obstacles systémiques et structurels profondément ancrés dans le racisme et la discrimination, l’homophobie et le sexisme, le capacitisme, le colonialisme et la violence. Bien qu’une analyse détaillée des indicateurs clés de la pauvreté parmi ces groupes mal desservis et négligés se trouve plus loin dans ce rapport, nous jugeons utile d’offrir un aperçu de la façon dont la pauvreté les affecte de façon disproportionnée.

IDENTITÉ AUTOCHTONE :

Les politiques et pratiques coloniales ont instigué et perpétué des iniquités, ce qui a entraîné une prévalence disproportionnée de la pauvreté chez les peuples autochtones. Selon les données du recensement de 2021, le taux de pauvreté chez les membres des Premières Nations vivant hors réserve était de 14,1 %, soit deux fois plus que celui des Allochtones (7,4 %). Les Métis et les Inuits affichaient des taux de pauvreté légèrement plus faibles, soit respectivement 9,2 % et 10,2 %.

Toutefois, il est important de reconnaître que ces chiffres présentent un portrait quelque peu trompeur, car ils ne tiennent pas compte des taux de pauvreté chez les Autochtones vivant dans les réserves et les établissements. Compte tenu de l’importance et de la complexité de l’expérience autochtone au Canada, une section de ce rapport sera consacrée à l’identité autochtone et aux principaux indicateurs de la pauvreté.

PERSONNES RACISÉES :

En 2021, 7,4 % de la population vivait sous le seuil de pauvreté. Toutefois, le taux chez les personnes racisées, soit 25 % de la population canadienne, était beaucoup plus élevé. À titre d’exemple, 19 % des Canadiens d’origine coréenne vivaient dans la pauvreté en 2021. Ce taux élevé de pauvreté était similaire à celui des Canadiens d’origine chinoise (15,3 %), des Canadiens noirs (12,4 %) et des Canadiens d’Asie du Sud (10,8 %).

Mettant en lumière la pauvreté chez les groupes racisés et sa persistance, une étude intitulée « La pauvreté chez les groupes racisés, d’une génération à l’autre » révèle que les groupes racisés affichent systématiquement des taux de pauvreté plus élevés que ceux de la population blanche. Bien que les taux de pauvreté aient tendance à être plus élevés chez les Canadiens de première génération, puis à diminuer chez les Canadiens de deuxième et de troisième génération, cette tendance générale ne s’applique pas à tous les groupes racisés. Par exemple, l’écart du taux de pauvreté chez les Latino-Américains et les Noirs est plus que doublé à la troisième génération. De même, les Arabes, les Asiatiques du Sud-Est et les Coréens de troisième génération ont des taux de pauvreté deux fois plus élevés que ceux des Blancs.

SEXE ET GENRE :

Les femmes peuvent être touchées de façon disproportionnée par la pauvreté, en particulier les mères monoparentales de jeunes enfants. La grande majorité des ménages monoparentaux (plus de 80 %) sont dirigés par des femmes et affichent des taux de pauvreté beaucoup plus élevés que les autres familles avec enfants. Selon les données du recensement de 2021, près de 1 ménage monoparental sur 3 (31,3 %) vivait dans la pauvreté. Ce phénomène, connu sous le nom de féminisation de la pauvreté, reflète les facteurs culturels, sociaux et structurels profondément ancrés qui contribuent au désavantage économique des femmes. C’est notamment le cas des mères qui risquent de subir une pénalité liée à la maternité à leur retour au travail. Les mères sur le marché du travail disent se sentir délaissées et surchargées, et jusqu’à 1 mère sur 3 envisage de quitter son emploi en raison d’un soutien insuffisant pour réintégrer le marché du travail après son congé de maternité. Les femmes et les filles font face à des obstacles systémiques ancrés dans le sexisme, les préjugés sexistes et la discrimination, les empêchant de participer pleinement à l’économie et d’en tirer profit. Ces obstacles limitent leur accès aux possibilités et aux ressources, ce qui perpétue leur vulnérabilité à la pauvreté.

Les personnes transgenres et non binaires sont également plus susceptibles de vivre dans la pauvreté. Selon les dernières données du recensement, le taux de pauvreté chez les femmes et les hommes transgenres était respectivement de 12,0 % et de 12,9 %. En comparaison, les femmes et les hommes cisgenres connaissent un taux de pauvreté beaucoup plus faible, soit respectivement 7,9 % et 8,2 %. Les personnes non binaires sont les plus durement touchées avec un taux de pauvreté de 20,6 %. Les jeunes adultes transgenres et non binaires sont particulièrement touchés, avec un taux de pauvreté de 19,3 % chez les personnes transgenres de 18 à 24 ans, et de 32,5 % chez les personnes non binaires du même groupe d’âge.

Dans l’ensemble, les recherches existantes montrent que les membres de la communauté 2ELGBTQIA+ sont victimes « de profondes disparités matérielles et souffrent d’importantes iniquités sociales et sanitaires ». Des données indiquent que les jeunes de la communauté 2ELGBTQIA+, les minorités sexuelles et de genre plus âgées, et les personnes bispirituelles sont les plus vulnérables à la pauvreté. Par exemple, des sondages (Voir également ici) sur l’itinérance ont révélé que les jeunes de la communauté 2ELGBTQIA+ sont l’une des populations en situation d’itinérance les plus surreprésentées. Pourtant, malgré ces points de données importants, les études quantitatives et qualitatives sur la pauvreté des personnes 2ELGBTQIA+ se font rares.

SITUATION DE HANDICAP :

L’Enquête canadienne sur l’incapacité de 2022 a révélé que 27 % des Canadiens âgés de 15 ans et plus (environ 8 millions de personnes) présentaient au moins une incapacité qui les limite dans leurs activités quotidiennes. Le plus récent rapport sur la pauvreté et l’incapacité révèle que les personnes en situation de handicap sont deux fois plus susceptibles de vivre dans la pauvreté que les personnes sans handicap (16,5 % contre 8,6 %). Même si le handicap est présent dans tous les groupes de population, les femmes sont plus susceptibles de déclarer avoir un handicap et de vivre dans la pauvreté. En 2021, 17,6 % des femmes en situation de handicap étaient pauvres, comparativement à 15,1 % des hommes en situation de handicap. Outre la surreprésentation des femmes en situation de handicap dans les données sur la pauvreté, les aînés en situation de handicap (personnes âgées de 65 ans et plus) sont également gravement touchés par un taux de pauvreté élevé (20 %), soit le quadruple du taux d’aînés sans handicap (4,7 %).

De plus, seulement 59 % des personnes en situation de handicap sont employées, comparativement à 80 % des personnes sans handicap. Les personnes en situation de handicap qui occupent un emploi sont plus susceptibles d’occuper des postes moins spécialisés, créant un écart de revenu, de sorte que les Canadiens âgés de 25 à 54 ans sans handicap ont un revenu 40 % plus élevé, soit un montant de 19 000 $ par année, que leurs pairs en situation de handicap. Ce pourcentage grimpe à 70 %, soit un montant de 27 000 $ par année, pour les 55 à 65 ans. Les difficultés à trouver et à conserver un emploi rémunérateur découlent souvent d’obstacles comportementaux, y compris les milieux de travail qui ne répondent pas adéquatement aux besoins des personnes en situation de handicap ou la réticence à éliminer les obstacles pour permettre aux employés de travailler à leur plein potentiel.

En plus des défis comportementaux liés à l’obtention d’un emploi valorisant, les populations marginalisées se heurtent également à des lacunes dans les programmes de soutien aux services sociaux visant à corriger les inégalités systémiques. La plupart des programmes de soutien du revenu conçus pour les personnes en situation de handicap, comme de nombreux programmes provinciaux d’aide aux personnes handicapées, utilisent des calculs de revenu de toutes sources pour déterminer l’admissibilité. Bien que le calcul du financement soit conçu pour combler l’écart dans les frais de subsistance d’une personne en situation de handicap, ces calculs exigent souvent que les personnes handicapées aient un revenu inférieur au seuil de pauvreté. De plus, aucun gouvernement provincial ne fournit de soutien aux personnes handicapées à un niveau qui correspond au seuil de pauvreté d’une province donnée. Tout cela garantit qu’une personne qui dépend des prestations d’invalidité continuera de vivre dans la pauvreté.

Également, de nombreuses personnes en situation de handicap ont de la difficulté à assumer les coûts liés à leur handicap. Les coûts liés au logement accessible, aux frais médicaux (équipement, ordonnances, suppléments, honoraires d’un praticien, etc.) et aux prestations d’invalidité qui ne sont pas financées par le gouvernement poussent davantage les personnes en situation de handicap vers le seuil de pauvreté. Dans bien des cas, ces dépenses sont nécessaires pour surmonter les défis en matière d’accessibilité dans l’environnement des personnes en situation de handicap. Par exemple, les frais pour des services de collecte en voiture ou de livraison en raison de l’inaccessibilité d’un magasin.

ÂGE :

Selon le plus récent rapport d’UNICEF Canada, la pauvreté infantile est passée de 4,7 % en 2020 à 6,4 % en 2021, soit une augmentation plus importante que l’augmentation de la pauvreté au sein de la population en général Toutefois, comme nous le verrons plus loin, il existe des disparités importantes au sein de la population d’enfants touchés par la pauvreté. Comme chez la plupart des autres groupes démographiques, la pauvreté infantile est influencée par l’intersectionnalité des facteurs identitaires, y compris la race, le genre et le capacitisme. Ainsi, 37,4 % des enfants des Premières Nations vivant dans les réserves, 24 % des enfants des Premières Nations vivant hors réserve, 19,4 % des enfants inuits, 15,2 % des enfants métis, 18,6 % des enfants noirs et 15,2 % des enfants racisés vivent dans la pauvreté.[1] Les enfants qui appartiennent à la communauté 2ELGBTQIA+, qui vivent dans des ménages monoparentaux et qui ont un handicap sont eux aussi plus à risque de pauvreté.

Le taux de pauvreté chez le principal groupe d’âge actif, soit les personnes âgées de 25 à 54 ans, était de 7,9 %, mais à mesure que les personnes approchent de la retraite, une plus grande proportion d’entre elles éprouvent des difficultés financières. Le taux de pauvreté commence à augmenter lorsque les individus atteignent la fin cinquantaine, atteignant un sommet de 10,1 % chez les personnes de 64 ans, avant de chuter considérablement à 66 ans. En comparaison, les aînés affichent le taux de pauvreté le plus faible parmi tous les groupes d’âge, soit 4,7 %, ce qui témoigne de la forte incidence des mesures de soutien offertes aux personnes à la retraite, y compris le RPC, la SV et le SRG.

Les taux de pauvreté disproportionnellement faibles chez les aînés montrent l’efficacité des versements gouvernementaux pour aider les gens à maintenir un niveau de vie supérieur au seuil de pauvreté. Toutefois, ces données contiennent un éventail d’expériences et certains aînés sont en situation d’insécurité financière. Le taux de pauvreté des aînés vivant seuls est 5 fois celui des personnes vivant avec leur famille (13,3 % comparativement à 2,4 %).

Conclusion – Aperçu de la pauvreté

Cet aperçu montre que les groupes marginalisés sont disproportionnellement vulnérables à la pauvreté. En effet, ces groupes vulnérables ont une probabilité statistiquement plus élevée de vivre dans la pauvreté et sont également moins susceptibles d’en sortir. De nombreux systèmes et structures interreliés, historiquement ancrés dans l’oppression et la domination, ont une incidence négative sur les groupes marginalisés, créant et perpétuant ainsi l’iniquité et l’injustice.

Indicateurs de pauvreté :

Pour évaluer la pauvreté au sein de la société canadienne, il est impératif d’examiner les indicateurs clés qui reflètent le niveau de vie et le bien-être des personnes. Ces indicateurs englobent diverses facettes, dont l’accès aux soins de santé, l’éducation, le revenu et l’emploi, le logement, l’environnement, la sûreté et la sécurité, et l’inclusion sociale.

La compréhension de ces indicateurs donne un aperçu des défis auxquels font face les personnes pour accéder à des produits de première nécessité, comme le logement, la nourriture et la sécurité du revenu, et souligne l’importance d’interventions ciblées pour réduire la pauvreté et promouvoir l’inclusion économique. La présente section met l’accent sur trois mesures de la qualité de vie et de la pauvreté : le revenu, le logement et la sécurité alimentaire, et examine l’incidence disproportionnée de ces facteurs sur les groupes marginalisés.

Revenu :

1. RACE :

Selon une analyse gouvernementale sur la pauvreté au Canada, les personnes racisées continuent de faire face à des obstacles systémiques liés au racisme et à la discrimination qui les rendent plus susceptibles de gagner un faible revenu ou un revenu moins élevé. Par exemple, en 2021, le revenu médian après impôt des personnes racisées était de 36 800 $, comparativement à un revenu médian après impôt de 43 100 $ pour les personnes non racisées, ce qui représente un écart moyen de 6 300 $. Alors que les Latino-Américains, les Philippins et les Noirs avaient le revenu le plus élevé parmi les groupes de personnes racisées, les Chinois (33 700 $), les Arabes (33 100 $) et les Sud-Asiatiques (33 200 $) avaient le revenu médian après impôt le plus faible.

Selon Statistique Canada, les personnes racisées gagnent un revenu plus faible au début de leur carrière et sont moins susceptibles d’occuper un emploi syndiqué et de bénéficier d’une pension. Cette année, notre sondage auprès de la population a également révélé que plus de la moitié (54 %) des personnes racisées au Canada s’accordaient pour dire que les faibles salaires nuisent à leur capacité de subvenir à leurs besoins. Il s’agit d’un taux de 21 points de pourcentage de plus que les Canadiens non racisés (33 %).

2. SEXE ET GENRE :

Au Canada, les femmes gagnent souvent moins d’argent que les hommes en raison d’une combinaison de facteurs systémiques, dont la discrimination fondée sur le sexe, la ségrégation professionnelle et l’inégalité des chances d’avancement professionnel. Cet écart, souvent appelé écart salarial entre les genres, a une incidence directe sur les revenus des femmes, ce qui entraîne une baisse des revenus tout au long de leur vie, une diminution de la sécurité financière et des possibilités limitées d’accumulation de richesse et d’indépendance économique. À titre d’exemple, les données du recensement de 2021 montrent que 11,4 % des femmes ont un faible revenu, comparativement à 9,4 % des hommes. Bien que cet écart ne semble pas important, des données supplémentaires indiquent qu’en 2021, le revenu d’emploi annuel moyen des Canadiennes s’élevait à 43 200 $, tandis que les Canadiens gagnaient 59 200 $ par année, ce qui représente une disparité de 16 000 $ entre les sexes. De plus, les recherches sur la participation des femmes au marché du travail suggèrent que les femmes sont surreprésentées dans les emplois à temps partiel et sous-représentées dans les emplois à forte demande comme les professions spécialisées et bien rémunérées (p. ex., les sciences, les technologies, l’ingénierie, etc.). Elles sont également surreprésentées dans les secteurs de soins de santé, d’éducation, d’hébergement et de services de restauration. La concentration des femmes dans les secteurs de services à bas salaire, qui ont connu une croissance négative des salaires au cours de la dernière décennie, augmente leur risque de pauvreté et d’instabilité économique en raison de l’insuffisance et de la précarité des revenus.

Toutefois, l’inégalité des revenus ne touche pas toutes les femmes de façon égale. Des disparités existent et persistent entre les différents groupes de population de femmes. Les femmes autochtones et immigrantes se heurtent à des obstacles importants pour accéder au marché du travail. Ces obstacles limitent leur participation économique et diminuent leur potentiel de revenus, ce qui entraîne une insécurité des revenus et un risque accru de pauvreté. Les femmes autochtones sont souvent victimes de racisme, de discrimination et de stéréotypes négatifs lorsqu’elles cherchent un emploi. Les effets continus de la colonisation, y compris la baisse des niveaux de scolarité et d’alphabétisation chez les Autochtones, aggravent cette situation. Comme les autochtones et les immigrantes, les femmes en situation de handicap font face à des obstacles les empêchant de gagner un revenu suffisant afin d’assurer leur sécurité économique. En fait, les femmes en situation de handicap sont beaucoup plus susceptibles d’avoir de la difficulté à répondre à leurs besoins financiers (38 %) que la population féminine en général (27 %).

3. 2ELGBTQIA+ :

Les données de 2018 indiquent que 40,5 % des personnes 2ELGBTQIA+ du Canada ont un revenu total avant impôt inférieur à 20 000 $. 24 % des personnes 2ELGBTQIA+ ont un revenu annuel entre 20 000 $ et 39 999 $. Ces deux points de données fusionnés révèlent qu’environ 65 % des personnes de la communauté 2ELGBTQIA+ font partie des deux quintiles de revenu inférieurs, comparativement à environ 50 % des personnes qui ne font pas partie de ce groupe. Une autre étude sur les caractéristiques économiques des personnes 2ELGBTQIA+ révèle que les personnes bisexuelles ont un revenu avant impôt (39 200 $) beaucoup plus bas que leurs homologues hétérosexuels (55 000 $) ou gais et lesbiennes (50 100 $). L’étude révèle également que les femmes hétérosexuelles (74 %) et bisexuelles (68,1 %) du principal groupe d’âge actif (25 à 65 ans) sont moins susceptibles d’occuper un emploi à temps plein ou à temps partiel.

4. SITUATION DE HANDICAP :

Pour finir, les personnes en situation de handicap font face à des obstacles continus en matière d’accessibilité et d’équitabilité en milieu de travail. L’Enquête sur la population active de 2022, par exemple, indique que « les personnes ayant une incapacité ont toujours enregistré un taux d’emploi plus faible que celui des personnes sans incapacité », en partie en raison des « besoins non comblés en matière de mesures d’adaptation en milieu de travail et de la discrimination en milieu de travail ». En fait, à mesure que la gravité de l’incapacité augmente, les taux d’emploi passent de 76,6 % (incapacité légère) à 65,5 % (incapacité modérée), à 50,4 % (incapacité grave) et à 26,8 % (incapacité très grave).

Par conséquent, les personnes en situation de handicap sont financièrement désavantagées par rapport aux personnes sans handicap, et ce désavantage augmente proportionnellement aux répercussions de l’invalidité sur la vie d’une personne. Cette disparité financière est évidente dans le revenu personnel après impôt médian des personnes en situation de handicap qui, selon l’Enquête canadienne sur l’incapacité de 2022, était de 32 870 $, comparativement à 39 490 $ pour les personnes sans handicap. Les personnes en situation de handicap sont disproportionnellement dépendantes des banques alimentaires en raison des faibles revenus et du manque de soutien. Cette disparité atteint des sommets alarmants en Ontario, par exemple, où les bénéficiaires de prestations d’invalidité représentent 30 % des utilisateurs des banques alimentaires, bien qu’ils ne représentent que 4 % de la population provinciale.

Logement :

Les coûts du logement ont grimpé en flèche au Canada, ce qui a eu une incidence disproportionnée sur les groupes marginalisés économiquement vulnérables. La crise actuelle a fait en sorte qu’un nombre croissant de personnes ont des « besoins impérieux en matière de logement », c’est-à-dire qu’elles habitent dans un logement qui ne répond pas aux normes de qualité (qui nécessite des réparations), qui n’est pas abordable (le montant du revenu avant impôt dépensé pour le loyer est trop élevé) ou qui n’est pas d’une taille convenable (le nombre de pièces est insuffisant pour la composition du ménage). Présentement, l’abordabilité des logements, soit lorsqu’un ménage consacre 30 % ou moins de son revenu total avant impôt pour payer son loyer, est le problème le plus urgent qui touche les locataires.

En fait, un rapport récent de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) indique que les besoins impérieux en matière de logement touchent plus largement et plus fortement les locataires que les propriétaires, puisque le revenu médian de ces derniers tend à être inférieur à la moitié de celui des propriétaires. Cela est particulièrement vrai pour les ménages locataires récents qui font face à des coûts mensuels plus élevés que les locataires existants. En fait, près de la moitié des locataires récents (43,2 %) étaient susceptibles de vivre dans un logement inabordable. Par conséquent, les ménages locataires représentent également 68 % des visites aux banques alimentaires, bien qu’ils ne représentent que 33 % de la population.

1. RACE :

Les problèmes d’abordabilité du logement ont beaucoup plus touché les locataires que les propriétaires. Comme les personnes racisées sont plus susceptibles d’être locataires que les personnes non racisées, elles sont plus vulnérables à l’augmentation des loyers. Les données actuelles du recensement sur le logement suggèrent que 17,2 % des personnes racisées (appelées « minorités visibles » dans les données du recensement) ont des besoins criants en matière de logement, comparativement à 16,7 % des personnes non racisées. Bien que cet écart puisse sembler faible à première vue, les chiffres sont trompeurs, car Statistique Canada ne classe pas les Autochtones dans la catégorie des « minorités visibles ». En raison du taux particulièrement élevé des Autochtones qui ont des besoins criants en matière de logement (23 % des locataires), la comparaison fournie ci-dessus ne permet pas de décrire avec exactitude la disparité réelle entre les personnes racisées et non racisées en ce qui concerne les besoins criants en matière de logement. En fait, une nouvelle étude menée par l’Université Western et l’Université de Toronto sur la crise de l’abordabilité au Canada a révélé que les personnes racisées sont plus susceptibles de vivre dans un logement inabordable que les personnes blanches. Selon cette étude, « les taux de logements inabordables étaient particulièrement élevés chez les personnes du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et de l’Asie du Sud ».

En dressant le portrait de l’accès des personnes racisées à un logement abordable, une analyse de Statistique Canada sur les locataires récents et les locataires existants indique que les locataires récents, soit les plus susceptibles de vivre dans un logement inabordable, sont latino-américains (11,9 %), arabes (10,3 %) et noirs (9,7 %). De plus, l’analyse révèle également qu’un sixième des immigrants récents (16,7 %) vivaient dans un ménage locataire récent en 2021. Ces constatations suggèrent que les immigrants sont plus aux prises avec des problèmes d’abordabilité du logement que les résidents nés au Canada, y compris ceux issus des mêmes groupes ethnoraciaux. Dans l’ensemble, 54 % des personnes racisées sont d’accord pour dire qu’il est difficile de suivre la hausse des loyers, comparativement à 32 % des personnes non racisées.

2. ÉTAT FAMILIAL :

La plupart des données de recensement récentes montrent que 30 % des ménages monoparentaux dirigés par une femme vivant en location ont des besoins criants en matière de logement, comparativement à 11,6 % des ménages biparentaux en location. Alors que le pourcentage de ménages monoparentaux dirigés par un homme locataires dans des logements de base suit de près derrière (28,4 %), ils ne représentent qu’une fraction des familles monoparentales (environ 15 à 20 %). Il y a donc une surreprésentation évidente des ménages monoparentaux qui louent des logements inabordables, inadéquats ou inadaptés.

3. ÂGE :

En 2021, plus d’un enfant sur trois (34,1 %) considéré comme pauvre vivait dans un logement inabordable, inadapté et surpeuplé, comparativement à 17,5 pour cent pour l’ensemble des enfants. Le taux d’enfants pauvres ou non vivant dans des logements de faible qualité est inquiétant, car les recherches indiquent  que la qualité ainsi que l’abordabilité du logement ont une incidence sur la santé et le développement des enfants.

En revanche, les aînés sont le groupe d’âge qui connaît la croissance la plus rapide au Canada. Selon les dernières estimations, 19,0 % de la population totale du Canada est âgée de 65 ans et plus, soit une augmentation de 2,1 % depuis 2016. Bien que la plupart des aînés (75 %) soient propriétaires de logements adéquats et abordables, ceux qui louent des logements présentent des vulnérabilités distinctes comme les locataires de tous les groupes. Près du quart (23 %) des aînés qui louent leur logement font face à des défis en matière de qualité et d’abordabilité.

4. ITINÉRANCE :

La crise du logement ait fait en sorte qu’un nombre croissant de résidents canadiens ont des besoins criants en matière de logement, et elle a également exacerbé l’itinérance, c’est-à-dire vivre « sans logement stable, sûr, permanent et adéquat, ou sans la possibilité, les moyens ou la capacité immédiate de s’en procurer un ». Comme nous l’avons déjà mentionné, il y a un manque important de données sur les personnes en situation d’itinérance, de sorte qu’il est difficile d’en dresser un portrait adéquat.

Étant donné que le recensement ne recueille pas de données sur l’itinérance, les données les plus fiables se trouvent dans les dénombrements ponctuels de l’itinérance qui « donnent un instantané de l’itinérance dans une communauté à un jour donné, ce qui comprend les personnes en situation d’itinérance dans des refuges et à l’extérieur des refuges et les personnes se trouvant dans un logement de transition ». D’après les plus récents dénombrements ponctuels coordonnés à l’échelle nationale en 2020 et en 2022, il est possible de distinguer certaines tendances sociodémographiques importantes.

La plupart des répondants au sondage étaient âgés de 25 à 49 ans (55 %) et s’identifiaient comme des hommes (63 %). Les Autochtones et les personnes 2ELGBTQIA+ vivent de façon disproportionnée de l’itinérance. Plus précisément, 31 % des répondants s’identifiaient comme Autochtones et étaient plus susceptibles de vivre hors des refuges (41 %) ou en situation d’itinérance cachée (45 %). Bien que les personnes en situation d’itinérance soient majoritairement des hommes (63 %), parmi les répondants autochtones, un pourcentage plus élevé de personnes s’identifient comme des femmes (40 %) que leurs homologues non autochtones (34 %). Ces personnes  sont également plus susceptibles d’avoir vécu en situation d’itinérance dans leur enfance ou leur jeunesse.

Les dénombrements ponctuels révèlent sans équivoque que les personnes 2ELGBTQIA+ (13 %) sont représentées de façon disproportionnée au sein de la population en situation d’itinérance, puisqu’elles ne représentent que 4 % de la population générale. Fait à noter, le pourcentage de jeunes 2ELGBTQIA+ au sein de ce groupe démographique était le plus élevé (26 %) parmi leur groupe d’âge. Interrogés sur les causes de la perte de logement, les répondants 2ELGBTQIA+ ont mentionné des problèmes de santé mentale (15 %) ou des conflits avec un parent ou un tuteur (12 %) plus fréquemment que leurs homologues, qui ont déclaré des taux de 9 % et de 7 % respectivement.

Sécurité alimentaire :

Avant d’examiner les données, il est essentiel de tenir compte de certaines tendances générales qui ont eu une incidence sur les niveaux récents de défavorisation matérielle, y compris l’insécurité alimentaire, au Canada. Des événements mondiaux comme la pandémie de COVID-19 et la guerre en Ukraine plus récemment ont entraîné en 2022 un taux d’inflation record qui n’avait pas été atteint depuis quarante ans. La hausse du taux d’inflation a également fait en sorte que certains groupes de personnes et de ménages ont eu de la difficulté à répondre à leurs besoins de base. Par exemple, la hausse du coût de la vie a eu une incidence disproportionnée sur le pouvoir d’achat des personnes à faible revenu, qui sont des personnes racisées, autochtones, des mères monoparentales et handicapées de façon disproportionnée. En pratique, les ménages aux revenus les plus faibles ont subi une diminution de 25 % du pouvoir d’achat, ce qui les a obligés à allouer près du quart de leur revenu à leurs dépenses alimentaires . Fait à noter, à la fin de 2022, 35 % de la population canadienne avait de la difficulté à payer des dépenses essentielles quotidiennes, y compris la nourriture, dont les coûts ont connu une augmentation supérieure à l’inflation. Entre février 2019 et 2024, le coût des aliments a augmenté de 26,9 %, et on prévoit que les prix des aliments augmenteront de 2,5 % à 4,5 % en 2024.

À titre d’exemple, les données de l’Enquête sociale canadienne (ESC) indiquent que 40,3 % des personnes autochtones ont eu de la difficulté à répondre à leurs besoins financiers. Parmi les groupes de population racisée, 56,9 % des personnes arabes, 50,1 % des personnes de l’Asie du Sud-Est et 46,6 % des personnes noires ont connu des difficultés financières importantes. En revanche, « seulement » 30,5 % des personnes qui ne sont pas considérées comme des minorités visibles ont fait face à des défis semblables. De plus, 40,7 % des personnes de la communauté 2ELGBTQIA+, comparativement à 32,7 % des personnes qui n’en font pas partie, ont éprouvé des difficultés financières. De plus, bien que 28,5 % des personnes non handicapées aient dû faire face à des difficultés financières, ce pourcentage a grimpé à 38,8 % chez les personnes handicapées.

En 2022, 2,7 millions de ménages souffraient d’insécurité alimentaire. Autrement dit, 17,8 % de la population canadienne, soit près d’un ménage sur 5, ce qui correspond à 6,9 millions de personnes, y compris 1,8 million d’enfants, répondait aux critères de l’insécurité alimentaire, comme l’incapacité d’acheter des aliments, d’avoir une alimentation équilibrée, de manger trois repas par jour et plus encore. Ces chiffres pourraient sous-estimer l’ampleur du problème, car les données du Bilan-Faim 2023 ont révélé que le nombre de visites aux banques alimentaires a augmenté de 32 % entre 2022 et 2023.

Les données disponibles montrent systématiquement que l’insécurité alimentaire des ménages est un problème multidimensionnel influencé par des facteurs comme la race, le sexe, l’âge et le capacitisme. Ainsi, les personnes blanches sont moins susceptibles de vivre de l’insécurité alimentaire, puisque 15,3 % vivent dans des ménages en situation d’insécurité alimentaire. En comparaison, les personnes noires (39,2 %), autochtones (33,4 %) et philippines (29,2 %) sont confrontées à des taux d’insécurité alimentaire beaucoup plus élevés dans leur ménage.

La nature racisée du problème est également apparente si l’on examine le pourcentage d’enfants ayant un accès inadéquat à la nourriture. En 2022, 24,3 % des enfants de moins de 18 ans vivaient dans des ménages en situation d’insécurité alimentaire. En fait, selon le rapport sur la pauvreté infantile d’UNICEF Canada de 2023, les enfants « présentent le taux d’insécurité alimentaire le plus élevé de tous les groupes d’âge au Canada ». Les chiffres sont plus déconcertants lorsqu’on examine le pourcentage d’enfants racisés, où, comparativement aux enfants blancs (19,3 %), 46,3 % des enfants noirs, 40,1 % des enfants autochtones, 33,5 % des enfants arabes, 32,9 % des enfants philippins et 29,5 % des enfants latino-américains ont vécu de l’insécurité alimentaire. Dans l’ensemble, la disparité entre les personnes racisées et non racisées est correctement prise en compte dans notre sondage national de cette année, qui a révélé que les personnes racisées étaient beaucoup plus susceptibles (41 %) de dire qu’elles s’inquiètent de nourrir leur famille que les personnes non racisées (28 %).

Comme mentionné ci-dessus, il existe un manque général de données concrètes sur la communauté 2ELGBTQIA+, y compris sur l’insécurité alimentaire. D’après les données existantes, nous savons que les personnes 2ELGBTQIA+ sont fortement et disproportionnellement touchées par la pauvreté, le faible revenu et l’itinérance. Par exemple, 40,5 % des personnes 2ELGBTQIA+ du Canada ont un revenu total (avant impôt) inférieur à 20 000 $. 24 % des personnes 2ELGBTQIA+ ont un revenu annuel entre 20 000 $ et 39 999 $. Ces faibles revenus nuisent grandement à la capacité des personnes d’accéder en toute sécurité à de la nourriture et de répondre à leurs besoins de base.

Selon les données de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) de 2015 à 2018, les personnes bisexuelles étaient près de trois fois plus susceptibles que les personnes hétérosexuelles (24,8 % contre 8,5 %) et presque deux fois plus susceptibles que les personnes gaies ou lesbiennes (13,3 %) d’avoir vécu dans des ménages en situation d’insécurité alimentaire au cours de l’année précédant l’enquête. De plus, une étude récente sur les expériences d’insécurité alimentaire des personnes 2ELGBTQIA+ à Toronto révèle que 42 % des répondants ont vécu de l’insécurité alimentaire. La surreprésentation des personnes 2ELGBTQIA+ dans la population en situation d’itinérance explique également leur accès précaire à la nourriture.

Il est essentiel de s’attaquer à l’insécurité alimentaire des ménages, car il s’agit de l’un des principaux prédicteurs d’une mauvaise santé, et sa persistance au Canada est un grave problème de santé publique. En bref, il s’agit d’un puissant déterminant social de la santé, car les personnes souffrant d’insécurité alimentaire, y compris les enfants, sont beaucoup plus susceptibles de souffrir de problèmes de santé physique et mentale chroniques ainsi que de maladies infectieuses et non transmissibles.

Peuples autochtones :

L’histoire du colonialisme au Canada, les politiques et processus coloniaux persistants ainsi que la discrimination, le racisme et l’oppression systémique continus touchent profondément les communautés autochtones. Ces facteurs historiques et contemporains nuisent considérablement à l’accès des peuples autochtones à des nécessités fondamentales comme le logement, la nourriture et la sécurité du revenu.

1. REVENU :

Toutes les populations autochtones, qu’il s’agisse des Métis (12,6 %), des Inuits (16,5 %), des Indiens non inscrits (16,8 %), des Indiens inscrits hors réserve (19,8 %) ou des Indiens inscrits vivant dans une réserve (31,3 %), affichent des taux de faible revenu beaucoup plus élevés que le reste de la population (10,7 %), selon le recensement de 2021.

En ce qui concerne le revenu, les répercussions historiques et continues des pratiques et politiques coloniales ont placé les Autochtones parmi les personnes à faible revenu de façon disproportionnée, perpétuant ainsi leurs expériences de pauvreté au Canada. Ils ont été affectés par la pandémie de façon disproportionnée en raison de leur marginalisation continue et de leurs circonstances socioéconomiques et culturelles souvent précaires, ce qui a entraîné une période de reprise plus lente par la suite.

2. LOGEMENT :

Le logement inadéquat pose un problème pressant au sein des communautés autochtones, particulièrement dans les régions éloignées et nordiques, où les matériaux de construction sont rares et coûtent plus cher que dans les régions non éloignées. Les communautés autochtones dans les réserves font face à des défis encore plus importants en raison des restrictions imposées par la Loi sur les Indiens, qui interdit l’utilisation de biens dans les réserves comme garantie pour accéder à un financement afin de construire ou de rénover des logements.

Pour mieux comprendre les conditions de logement des peuples autochtones, il faut tenir compte des données suivantes : Selon le recensement de 2021, 16,1 % des Autochtones vivent dans des logements nécessitant des réparations majeures, comme des moisissures ou des défauts structurels, comparativement à 5,7 % des non-Autochtones. Cela indique que les peuples autochtones sont trois fois plus susceptibles de vivre dans un logement inadéquat, dangereux et malsain. De plus, 17,1 % des personnes autochtones vivent dans des logements surpeuplés, ce qui signifie qu’elles dépassent la norme nationale d’occupation pour les espaces de vie convenables. Ce pourcentage passe à 25,4 % pour les Autochtones inscrits ou ayant le statut d’Indien des traités. Par exemple, une proportion importante d’Inuits vivent dans des logements où il manque une, deux ou trois chambres à coucher ou plus encore, ce qui souligne davantage les défis en matière de logement auxquels font face les communautés autochtones.

Enfin, l’itinérance autochtone au Canada est étroitement liée au passé colonial du pays et à ses effets durables. Il est essentiel de comprendre que l’expérience autochtone de l’itinérance va au-delà du simple manque de logement. Les Autochtones vivent douze aspects distincts de l’itinérance : le déplacement historique, la séparation des terres ancestrales, la déconnexion spirituelle, le déséquilibre mental, l’érosion culturelle, le surpeuplement des logements, la réinstallation pour des occasions socioéconomiques, le retour chez eux en tant qu’étrangers, le manque de refuge, la fuite en raison de préjudices, les crises et le déplacement en raison des changements climatiques.

En plus de leur expérience unique de l’itinérance, les peuples autochtones, y compris les communautés des Premières Nations, des Métis et des Inuits, sont touchés de façon disproportionnée par l’itinérance dans les régions urbaines du Canada, où près du tiers des répondants s’identifiant comme Autochtones (24 % comme Premières Nations, 6 % comme Métis et 2 % comme Inuits) selon les plus récents dénombrements ponctuels de l’itinérance au Canada. Cette surreprésentation est évidente lorsqu’on la compare aux données du recensement, où environ 5 % des personnes au Canada s’identifient comme Autochtones. De plus, les répondants autochtones sont plus susceptibles de vivre hors des refuges ou en situation d’itinérance cachée, ce qui donne à penser que les statistiques propres aux refuges pourraient sous-estimer l’ampleur de l’itinérance autochtone.

De plus, les répondants autochtones, 75 % des répondants autochtones sont en situation d’itinérance chronique, comparativement à 68 % des répondants non autochtones. Les dénombrements ponctuels de l’itinérance révèlent que des expériences d’itinérance précoces étaient également répandues chez les répondants autochtones. Les expériences d’itinérance précoces étaient également répandues chez les répondants autochtones; 55 % ont d’abord vécu l’itinérance pendant l’enfance ou la jeunesse, comparativement aux répondants non autochtones qui avaient tendance à vivre l’itinérance à l’âge adulte. Les répondants autochtones étaient également plus susceptibles d’avoir été pris en charge par le système de protection de l’enfance dans leur jeunesse, 51 % ayant déclaré de telles expériences comparativement à 22 % des répondants non autochtones.

En ce qui concerne les problèmes de santé, les répondants autochtones ont affiché des taux plus élevés pour tous les problèmes de santé, la différence la plus marquée étant observée dans les problèmes de consommation de substances, qui ont été signalés par 69 % des répondants autochtones comparativement à 57 % pour les répondants non autochtones. Cette surreprésentation des peuples autochtones parmi les personnes en situation d’itinérance souligne l’interaction complexe des facteurs historiques, culturels et systémiques qui perpétuent l’itinérance dans les communautés autochtones.

3. SÉCURITÉ ALIMENTAIRE :

Les données sur l’insécurité alimentaire des ménages autochtones au Canada proviennent principalement de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) et de l’Enquête canadienne sur le revenu (ECI). Toutefois, ces enquêtes excluent les personnes vivant dans les réserves et ne permettent pas de saisir pleinement l’expérience des Autochtones résidant dans les réserves, qui représentent près de la moitié des membres inscrits des Premières Nations au Canada. Il s’agit d’une lacune importante et très préoccupante dans les données et il est impossible de comprendre toute l’ampleur de la situation. Selon les recherches disponibles, les données indiquent que les Autochtones affichent des taux d’insécurité alimentaire plus élevés que le reste de la population. Des enquêtes menées dans les communautés nordiques éloignées, comme le Nunatsiavut et le Nunavik, révèlent des taux alarmants d’insécurité alimentaire des ménages. Toutefois, les personnes qui résident dans ces communautés sont probablement sous-sondées en raison de la couverture et de l’échantillonnage limités. Comme nous l’avons examiné dans le rapport Ressources de données et défis des Premières Nations, les communautés des Premières Nations ont également subi des préjudices en raison de l’utilisation abusive de leurs données et ont été « étudiées à n’en plus finir », ces données étant rarement utilisées au profit des communautés concernées. Cette mauvaise utilisation des données a entraîné une perte de confiance et une appropriation illicite. Bien que les différences méthodologiques rendent difficiles les comparaisons directes, il est probable que l’insécurité alimentaire chez les peuples autochtones soit encore plus grave que ne le suggèrent les estimations nationales, compte tenu de cette sous-représentation.

Selon l’étude approfondie et novatrice sur la nutrition et l’environnement chez les Premières Nations, qui vise à combler les lacunes dans les connaissances sur la nutrition et la sécurité alimentaire des Autochtones dans les réserves, l’insécurité alimentaire (48 %) est très répandue dans les communautés des Premières Nations. Les taux d’insécurité alimentaire les plus élevés ont été observés en Alberta (60 %) et dans les communautés éloignées, alors que les plus faibles ont été observés dans le nord de la Colombie-Britannique. En général, les ménages comptant au moins deux personnes occupant un emploi à temps plein, les personnes âgées de 71 ans et plus, les hommes, les personnes ayant déclaré être en bonne santé et les non-fumeurs ont connu des niveaux d’insécurité alimentaire plus faibles. D’autres études comme celle-ci sont nécessaires pour combler l’écart de recherche, en particulier sur l’état de santé, qui existe entre les Autochtones et les non-Autochtones. Cette mesure est essentielle pour répondre à l’appel 19 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, qui demande au gouvernement du Canada « en consultation avec les peuples autochtones, d’établir des objectifs quantifiables pour cerner et combler les écarts dans les résultats en matière de santé entre les collectivités autochtones et les collectivités non autochtones ».

L’insécurité alimentaire des Autochtones est aggravée par des possibilités d’emploi et des niveaux de revenu inadéquats comparativement à la hausse des dépenses alimentaires. Pour couronner le tout, les prix des aliments sont nettement plus élevés dans les communautés éloignées des grands centres urbains, ce qui rend impossible l’approvisionnement alimentaire sain et abondant. En fait, l’Étude sur l’alimentation, la nutrition et l’environnement chez les Premières Nations (EANEPN) indique que le coût des aliments peut être deux à trois fois plus élevé dans les communautés situées à plus de 50 kilomètres des carrefours urbains, avec des prix encore plus élevés dans les communautés accessibles uniquement par avion. Dans l’ensemble, près de la moitié des familles des Premières Nations peinent à se nourrir adéquatement. Les répercussions sont encore plus marquées chez les familles avec des enfants.


[1] Calcul à l’aide de la MFR-60 plutôt que la MPC.