Kimothy Stewart vit à Fredericton et travaille comme coordonnatrice du marketing pour Parcs Nouveau-Brunswick. Fière mère de deux enfants, elle siège dans ses temps libres au conseil d’administration de Greener Village, une importante banque alimentaire locale et un organisme de services communautaires. Elle est aussi une ancienne cliente de la même banque alimentaire. « Il m’a fallu presque dix ans pour pouvoir le dire à haute voix », dit-elle, sachant qu’elle n’est pas la seule au Canada dans ce cas. Elle souhaite lutter contre la stigmatisation qui peut accompagner le fait d’y avoir recours.

Il y a des années, Kimothy s’est soudainement retrouvée monoparentale avec un diplôme universitaire inachevé. Elle a accepté deux emplois relativement peu rémunérés : l’un à temps plein et l’autre à temps partiel. Mais même en travaillant autant, il était très difficile pour elle de payer la nourriture, le logement, le chauffage, le transport et les autres besoins essentiels pour elle-même et pour ses jeunes enfants.
Elle a décidé à contrecœur de communiquer avec sa banque alimentaire locale. « Ça n’a pas été facile, avoue-t-elle. Ce n’est certainement pas une décision que qui que ce soit prend à la légère. » Elle se souvient du sentiment d’échec qui a accompagné cette décision. Elle a toutefois constaté que le personnel et les bénévoles étaient chaleureux et accueillants. Au fil du temps, elle s’est rendu compte que personne ne la jugeait et qu’elle n’avait pas à le faire envers elle-même. « Il faut féliciter les clients de la banque alimentaire d’avoir eu le courage de demander de l’aide », affirme-t-elle.
Après avoir fait ce pas elle-même, Kimothy a mené une vie familiale modeste mais heureuse. Elle garde notamment de bons souvenirs des soupers pizza rendus possibles grâce à un partenariat entre la banque alimentaire et une pizzeria locale. « Un soir par mois, mes enfants avaient droit à une soirée pizza, tout comme leurs amis, dit-elle. Ça semble anodin, mais ça comptait énormément pour nous. »
Au cours de cette période, Kimothy a pu retourner aux études et obtenir ses diplômes. Elle est maintenant propriétaire d’une maison, voyage avec sa famille et a retrouvé la stabilité financière. « Le plus important, c’est que je suis maintenant capable de redonner », ajoute-t-elle.
L’expérience de Kimothy montre qu’en répondant aux besoins fondamentaux, les banques alimentaires redonnent aux gens l’énergie, le temps et la possibilité de bâtir leur vie. Les banques alimentaires visent cet objectif depuis des décennies et s’efforcent continuellement d’améliorer et de renforcer leurs capacités. Cependant, au cours des dernières années, la progression fulgurante de l’insécurité alimentaire au Canada a menacé leur capacité d’offrir du soutien à tous ceux qui en ont besoin.
Renverser la situation de la faim au Canada
Banques alimentaires Canada documente cette augmentation des besoins dans son rapport annuel Bilan-Faim, une enquête de type recensement menée auprès de la plupart des organismes, programmes et banques alimentaires du pays. Notre nouveau Bilan-Faim 2025 indique que le nombre de visites qu’ils reçoivent collectivement a doublé depuis 2019, atteignant près de 2,2 millions de visites en mars 2025 seulement.
Le rapport indique également qu’un client de banque alimentaire sur cinq occupe un emploi, mais qu’il n’arrive toujours pas à joindre les deux bouts, une proportion qui augmente en raison des salaires qui n’ont pas suivi l’inflation. Pour la même raison, environ le quart des ménages qui dépendent des banques alimentaires sont maintenant des familles biparentales. De plus, environ un tiers des clients sont des enfants.
Les employés, les bénévoles et les donateurs des banques alimentaires veulent que chaque personne parmi ces millions ait le droit d’obtenir du soutien et puisse développer son potentiel, comme ce fut le cas pour la famille de Kimothy et pour bien d’autres. Mais les banques alimentaires ne peuvent pas y arriver seules : sans des mesures législatives courageuses pour améliorer globalement la situation, elles peinent à suivre le rythme.
« Le Bilan-Faim du Canada ne cesse de s’aggraver », prévient Kirstin Beardsley, chef de la direction de Banques alimentaires Canada, qui demande la mise en œuvre de stratégies ciblées de réduction de la pauvreté et des mesures stratégiques gouvernementales urgentes pour soutenir les travailleurs à faible revenu et les enfants souffrant d’insécurité alimentaire, offrir des logements abordables et des prestations sociales adéquates.
« Nous pouvons faire de nouveaux choix », poursuit Kirstin Beardsley. Nous pouvons grandement améliorer le Bilan-Faim du Canada. Il faut d’abord nourrir la dignité et valoriser le potentiel humain », affirme-t-elle.
Kimothy est d’accord. « Les gens essaient vraiment de s’en sortir et ont juste besoin d’un coup de pouce, dit-elle. Nous pouvons leur donner une raison de continuer à essayer. Nous pouvons faire partie de la solution pour qu’ils s’épanouissent. »
Consultez les conclusions générales de notre plus récent rapport Bilan-Faim et nos recommandations de politiques pour réduire de moitié l’insécurité alimentaire au Canada d’ici 2030.