Chaque année, Banques alimentaires Canada mène un sondage auprès du réseau de banques alimentaires afin de fournir une perspective unique et précieuse sur l’insécurité alimentaire au pays. Nos recherches contredisent la fausse hypothèse persistante selon laquelle les nouveaux arrivants, ou les réfugiés nouvellement arrivés en particulier, reçoivent une quantité disproportionnée de prestations gouvernementales.
En fait, nos constatations révèlent le contraire : les gouvernements ne soutiennent pas adéquatement les nouveaux arrivants.
En analysant qui a recours aux banques alimentaires et pourquoi, le rapport annuel Bilan-Faim de Banques alimentaires Canada nous permet de voir les tendances exploitables et de formuler des recommandations stratégiques éclairées. Dans le cadre du dernier Bilan-Faim, nos chercheurs ont examiné les sources de revenus des personnes qui ont visité les banques alimentaires.
De nombreuses personnes au Canada, qu’elles aient déjà eu recours à une banque alimentaire ou non, reçoivent des prestations gouvernementales comme l’aide sociale provinciale, les prestations d’invalidité, l’assurance-emploi, la Sécurité de la vieillesse ou l’Allocation canadienne pour enfants.
Toutefois, au cours de leurs premières années, de nombreux nouveaux arrivants ne sont pas admissibles à ces programmes ou ne sont pas au courant de ceux-ci. L’analyse de notre base de données sur les admissions a révélé que parmi les personnes qui ont eu recours aux banques alimentaires, les nouveaux arrivants (au Canada depuis moins de deux ans) sont plus susceptibles de gagner un revenu d’emploi ou de ne recevoir aucun revenu que les personnes nées au Canada ou qui vivent ici depuis plus de 10 ans. Les visiteurs des banques alimentaires de ce dernier groupe étaient plus susceptibles d’avoir des prestations fédérales ou provinciales comme source de revenus.
L’écart au niveau de l’assurance-emploi
Comparativement à la population générale au Canada, les nouveaux immigrants sont plus susceptibles d’être actuellement sans emploi ou d’occuper des emplois moins bien rémunérés et peu sûrs. Les personnes titulaires de permis de travail temporaires sont vulnérables à l’exploitation par leurs employeurs. Les nouveaux arrivants classés comme travailleurs ou professionnels qualifiés peuvent composer avec des conditions beaucoup plus complexes que les Canadiens d’origine et ont besoin de plus de temps et d’efforts pour obtenir un emploi dans leur domaine. Malgré tout, et même si beaucoup d’entre eux sont tenus de payer des impôts, les nouveaux arrivants sont les moins en mesure d’avoir accès aux prestations d’assurance-emploi.
« L’un de nos principaux facteurs était les cas difficiles des travailleurs étrangers temporaires mis à pied sans soutien. »
– Membre du réseau de banques alimentaires et répondant au sondage Bilan-Faim, Î.-P.-É.
En mars 2024, lorsque Banques alimentaires Canada recueillait des données pour le dernier rapport Bilan-Faim, Statistique Canada a enregistré une légère augmentation du chômage dans la population générale et un pic chez les nouveaux arrivants.[1] Sans surprise, cela a coïncidé avec une hausse de leurs visites aux banques alimentaires.
Cela a également coïncidé avec la croissance de l’écart entre le nombre de chômeurs et la proportion d’entre eux qui reçoivent de l’assurance-emploi. Selon les données de Statistique Canada, seulement 34 % des chômeurs accèdent à l’assurance-emploi, soit le niveau le plus bas enregistré dans l’histoire du Canada.[2]
Graphique 1 : Personnes sans emploi par rapport aux prestataires d’assurance-emploi, variation en pourcentage depuis décembre 2022

Globalement, ces constatations révèlent que les personnes récemment arrivées n’ont pas eu accès aux prestations gouvernementales, même lorsqu’elles en ont besoin en raison d’une mise à pied, de la difficulté à trouver un emploi ou d’un emploi dont le revenu est insuffisant.
Solutions stratégiques
Les chocs sur le marché du travail peuvent toucher n’importe qui, mais les personnes récemment arrivées sont particulièrement vulnérables. Pour atténuer ces défis et réduire le rôle qu’ils jouent dans l’insécurité alimentaire, Banques alimentaires Canada milite pour :
- Inciter les entreprises à verser un salaire décent à tous les employés
- Remanier l’assurance-emploi pour mieux tenir compte de la nature des emplois et des situations modernes comme le travail autonome et le « travail à la demande »
- Élaborer un plan pour éliminer progressivement les permis de travail temporaires propres à l’employeur d’ici la fin de 2028
- Assouplir les règlements qui s’appliquent à l’agrément professionnel et qui empêchent les immigrants ayant suivi une formation dans des domaines comme le génie et les soins de santé d’occuper des rôles semblables au Canada.
- Accroître le financement de la formation linguistique et des services après leur arrivée.
Près de 80 % des immigrants qui ont recours aux banques alimentaires sont au Canada depuis moins de 2 ans. Par conséquent, offrir un meilleur soutien aux familles à leur arrivée pourrait réduire considérablement les demandes insoutenables auxquelles font face les banques alimentaires, réduire le nombre de personnes qui souffrent de la faim au pays et aider nos nouveaux voisins à réaliser le plein potentiel de leur vie au Canada.
Pour en savoir plus sur ces solutions et d’autres, veuillez consulter nos recommandations politiques.
[1] Statistique Canada. (6 septembre 2024) Tableau 14-10-0082-01 Caractéristiques de la population active selon le statut d’immigrant, moyennes mobiles de trois mois, données non désaisonnalisée. https://www150.statcan.gc.ca/t1/tbl1/fr/tv.action?pid=1410008201&request_locale=fr.
[2] Yalnizyan, A. (9 août 2024). Opinion : Out of work? You may be out of luck. Why getting EI is harder than it’s ever been. Toronto Star. Toronto Star. https://www.thestar.com/business/opinion/out-of-work-you-may-be-out-of-luck-why-getting-ei-is-harder-than/article_51bbb61a-510d-11ef-ab64-d3cca38e6d9a.html
Source des données pour la graphique : Statistique Canada. Tableau 14-10-0011-01 Prestataires d’assurance-emploi (prestations régulières) par province et territoire, données mensuelles désaisonnalisées. https://www150.statcan.gc.ca/t1/tbl1/fr/tv.action?pid=1410001101&request_locale=fr, et Statistique Canada.. Tableau 14-10-0287-01 Caractéristiques de la population active, données mensuelles désaisonnalisées et la tendance-cycle, cinq derniers mois.
Graphique fondé sur Lundy, M. (29 juillet 2024). « Why unemployment is rising, but jobless benefits aren’t keeping pace ». Globe and Mail. https://www.theglobeandmail.com/business/article-why-unemployment-is-rising-but-jobless-benefits-arent-keeping-pace/